La Journée mondiale de la liberté de la presse a mis en lumière les progrès réalisés en matière de liberté d’expression au Bénin, mais elle a aussi rappelé les difficultés auxquelles les journalistes sont confrontés. Entre les avancées technologiques, les risques de manipulation numérique et les défis structurels internes, l’avenir du journalisme béninois se joue aujourd’hui sur la capacité à allier innovation et rigueur professionnelle.
Le 3 mai dernier, dans une atmosphère à la fois solennelle et fraternelle, la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (Haac) a abrité la cérémonie officielle de la Journée mondiale de la liberté de la presse, placée sous le thème « Informer dans un monde compliqué : l’impact de l’intelligence artificielle sur la liberté de la presse et les médias ». Un moment pour célébrer les progrès réalisés, mais aussi pour évaluer les menaces persistantes qui pèsent sur le journalisme au Bénin.
Dans son discours, Zakiath Latoundji, présidente de l’Union des professionnels des médias du Bénin (Upmb), a dressé un tableau contrasté de la situation de la presse dans le pays. Si des avancées ont été notées, notamment en matière d’ouverture de l’espace médiatique, la liberté de la presse reste, selon elle, un chantier permanent. En effet, les journalistes béninois font face à des pressions politiques, une autocensure croissante, des restrictions d’accès à l’information publique, et des risques judiciaires importants.
La précarité économique des journalistes, confrontés à des salaires dérisoires, à l’absence de contrats et à une couverture sociale quasi inexistante, est une autre réalité douloureuse.Zakiath Latoundji a notamment plaidé pour des réformes structurelles visant à garantir aux journalistes une existence professionnelle digne, avec un véritable soutien à la presse privée et indépendante.
L’intelligence artificielle et ses dérives : une menace sous-jacente
Pour Édouard Loko, président de la Haac, la question de l’intelligence artificielle ne doit pas occulter les vrais défis auxquels le journalisme béninois est confronté. Si l’IA offre des avantages indéniables, tels que la rapidité d’accès à l’information, elle comporte aussi des risques, notamment en matière de manipulation et de désinformation. Edouard Loko a illustré son propos en évoquant le cas d’un faux message vidéo attribué à l’artiste Maître Gims, monté de toute pièce par des logiciels de manipulation d’image.
Cependant, pour le président de la Haac , l’IA n’est pas le plus grand défi auquel font face les médias africains. Selon lui, le véritable danger réside dans ce qu’il qualifie de « démocratie artificielle », une démocratie imposée de l’extérieur, souvent contournée par ceux qui en ont établi les règles. Il a insisté sur la nécessité d’une réforme profonde du secteur des médias, afin de garantir une presse indépendante, éthique et professionnelle.
Dans un contexte où l’accès à l’information est de plus en plus facilité par la technologie, la Haac a fait un pas significatif en présentant son nouveau site web, qui permettra désormais aux journalistes de soumettre en ligne leurs demandes de cartes de presse, d’accréditation ou de laissez-passer.La cérémonie s’est clôturée sur une note conviviale, avec le partage du traditionnel « mouton de la Haac », un symbole de fraternité et d’unité entre les acteurs de la régulation et les professionnels des médias. Un moment de retrouvailles qui rappelle que, malgré les tensions et les défis, la solidarité demeure le pilier fondamental sur lequel le journalisme béninois doit s’appuyer pour relever les défis actuels.
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