La confrontation militaire directe entre l’Iran et Israël a provoqué des secousses au-delà du champ de bataille. Elle a mis à nu une fracture ancienne et profonde dans l’opinion publique arabe : entre ceux qui voient dans la riposte iranienne un acte de résistance contre l’impunité israélienne, et ceux qui considèrent Téhéran comme un danger aussi grand voire plus que Tel-Aviv.
Dans plusieurs pays arabes, notamment au Liban, en Irak, au Yémen ou parmi les cercles pro-palestiniens, les tirs de missiles iraniens ont été salués comme une réponse « historique » à l’arrogance militaire israélienne. Sur les réseaux sociaux, de nombreux messages, vidéos et slogans « une roquette pour Jérusalem » ont proliféré, glorifiant l’intervention de l’Iran comme un signal fort contre l’hégémonie d’Israël dans la région.
Ce soutien est particulièrement visible parmi les partisans du Hezbollah, des Houthis ou des factions armées palestiniennes, qui voient dans la posture iranienne un rééquilibrage du rapport de forces régional. Pour ces groupes, l’action de Téhéran est moins perçue comme une manœuvre stratégique que comme un acte de solidarité envers Gaza et Al-Qods.À l’opposé, dans les monarchies du Golfe et chez nombre de leurs éditorialistes et influenceurs, le ton est tout autre.
L’hostilité envers l’Iran est frontale, parfois même plus virulente que celle envers Israël. La riposte israélienne contre des cibles iraniennes a été accueillie avec satisfaction, certains qualifiant l’Iran de « véritable menace régionale » en raison de son soutien à des groupes comme le Hamas ou les Houthis, considérés comme des instruments de l’expansionnisme chiite.
Le passé guerre Iran-Irak, rôle en Syrie, milices chiites en Irak — pèse lourd. Pour beaucoup, l’Iran instrumentalise la cause palestinienne pour masquer ses ambitions régionales. Cette vision, amplifiée par des médias pro-régimes, justifie même, pour certains, une alliance stratégique avec Israël face à ce qu’ils qualifient de « marée perse ».
Une troisième voie s’exprime aussi, plus silencieuse mais bien réelle : celle d’un public arabe désabusé, qui refuse de choisir entre deux puissances qu’il juge étrangères à ses aspirations. Pour eux, ni l’Iran ni Israël ne représentent un projet de libération ou de développement véritable. Ce camp dénonce la guerre comme un spectacle de puissances régionales utilisant la Palestine ou l’Iran profond comme terrain de jeu.
Une escalade régionale redoutée
« Ce conflit ne nous concerne pas. C’est une lutte d’intérêts, pas un combat pour la justice », confie un internaute égyptien sur X.Sur le plan géopolitique, cette guerre ouverte entre deux ennemis historiques s’inscrit dans un contexte plus large : programme nucléaire iranien sur le point d’aboutir, implication des États-Unis, menace d’un embrasement régional par l’implication du Hezbollah ou des milices pro-iraniennes.
Israël affirme avoir ciblé des infrastructures nucléaires, tandis que l’Iran a lancé des drones en riposte.Selon le politologue Ely Karmon, interrogé par Euronews, « l’objectif israélien est d’empêcher à tout prix l’Iran de se doter d’une arme nucléaire ». Il prévient que « si l’Iran réplique via ses alliés, le conflit pourrait s’étendre à toute la région ».Alors que la Russie, proche de l’Iran, et la Chine, médiatrice entre Téhéran et Riyad, observent attentivement, une reconfiguration géopolitique est en marche.
D’un côté, l’axe russo-irano-chinois ; de l’autre, le bloc israélo-américain, soutenu discrètement par plusieurs régimes arabes. La possibilité d’une guerre par procuration à grande échelle inquiète la communauté internationale.
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