Dans le nord du Ghana, ancien carrefour de la traite des êtres humains, des descendants d’esclaves venus des Amériques et des Caraïbes reviennent sur la terre de leurs ancêtres. Un voyage chargé d’émotion, de mémoire et de quête identitaire.uAutrefois haut lieu du commerce d’êtres humains, le nord du Ghana et les villes comme Salaga ont longtemps servi de plaques tournantes pour le marché aux esclaves.
Les captifs, souvent originaires de communautés voisines telles que Nok, dans l’actuel Togo, y étaient amenés avant d’être vendus et envoyés de force vers les Amériques. Aujourd’hui, les descendants de ces millions d’Africains déracinés reviennent, dans une démarche de réconciliation avec l’histoire et de reconnexion avec leurs origines.À Salaga, autrefois considéré comme un « supermarché » de la traite, les marques et les récits témoignent encore du passé.
« Si vous vouliez un esclave plus fort, c’est ici que vous veniez. Les tatouages sur leur peau indiquaient leurs origines », raconte un guide local.Ces voyages s’inscrivent dans un phénomène croissant : celui du tourisme mémoriel. Il ne s’agit pas de simples circuits touristiques, mais d’une démarche personnelle et souvent spirituelle. Pour ces visiteurs venus des États-Unis, du Brésil ou des Antilles, c’est un retour à la maison, à la source d’une histoire fragmentée par l’horreur de l’esclavage.
Quête identitaire et reconstruction
À défaut de documents historiques ou de récits familiaux, certains ont recours à la science pour combler les vides. Corren Lewis, venue également au Ghana, raconte :« Ma fille a fait une analyse ADN. Elle a prouvé que nous étions Africains à 78 %, et a même décomposé les régions d’où nous venions. En 2019, je suis venue ici, et j’ai ressenti que c’était le point de départ, que c’était chez moi. » Cette quête identitaire révèle la profondeur du traumatisme historique, mais aussi la volonté de reconstruction culturelle.
Ces voyages sont souvent l’occasion de cérémonies symboliques : poser un pied sur la terre des ancêtres, toucher les murs d’un ancien marché aux esclaves, déposer des offrandes, ou simplement pleurer.Selon l’UNESCO, entre 15 et 20 millions d’Africains ont été déportés durant la traite transatlantique des esclaves. Ils ont été emmenés principalement vers les Amériques et les Caraïbes, où leurs descendants vivent aujourd’hui.
Si l’histoire de l’esclavage reste marquée par la violence et la perte, ces retours au Ghana permettent d’y inscrire aussi une dimension de dignité, de résilience et de transmission. Ils rappellent que malgré les siècles d’arrachement, l’Afrique reste un foyer vivant de mémoire, de culture et d’appartenance.
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