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Prochaines élections, les Démocrates, Boni Yayi … développement

Lire l’intégralité de l’entretien de Talon accordé à la presse

Patrice Talon se livre comme rarement. Depuis le Palais de la Marina, le chef de l’Etat signe mardi 4 novembre 2025, un plaidoyer pour la réforme politique qu’il aura portée envers et contre tous — et règle, au passage, ses comptes avec Boni Yayi, qu’il accuse d’avoir empoisonné la vie démocratique depuis 2019. Mais derrière la fermeté du réformateur transparaît la lassitude d’un homme en fin de cycle, désireux de tourner la page d’une rivalité qui, selon lui, étouffe le pays. Un entretien confession, à la fois politique et intime, où le chef de l’État appelle le Bénin à se réconcilier avec lui-même. Lire l’entretien en intégralité.

 

Bienvenue dans cet entretien exceptionnel avec le président Patrice Talon, qui prend aujourd’hui la parole au cœur de ce qui ressemble à une tambouille préélectorale. Monsieur le président, bonsoir, et merci de nous recevoir ici, dans l’un de vos bureaux du Palais de la Marina.

Monsieur le président, l’ambiance préélectorale, vous le savez, n’est pas des plus sereines, puisqu’il y a encore des partis politiques qui n’arrivent pas à satisfaire aux conditions prévues par les lois électorales. Comment appréciez-vous cette situation ? Et, avec le recul, est-ce que la réforme du système partisan n’est pas un peu trop exigeante ?

Je dois vous avouer que la situation dans laquelle se trouve la dynamique électorale ne m’enchante pas du tout. Elle porte un préjudice à l’image de notre pays. Mais pour autant, il n’y a pas lieu d’indexer la réforme du système partisan, encore moins le code électoral. Les difficultés observées chez Les Démocrates sont-elles la conséquence d’un code électoral trop contraignant ou résultent-elles d’une main cachée, en l’occurrence celle du président Talon ? Comme je suis devenu le souffre-douleur du président Boni Yayi et le bouc émissaire idéal pour tout ce qui ne va pas chez les démocrates, que puis-je dire pour ne pas être condamné ? Je suis le coupable idéal. Avant de me retrouver à l’échafaud, je vais vous dire toute la vérité. Tout ce que j’essaie de couvrir depuis fort longtemps, en raison de ma charge et de la réserve que cela m’impose.

En effet, depuis 2016, mon prédécesseur, le président Boni Yayi, s’emploie avec beaucoup d’énergie à faire échec à toutes les réformes, quelles qu’elles soient, et à l’action publique, quel que soit le secteur. Avant 2016, tout le monde priait pour une réforme du système partisan. Nous l’avons engagée, et j’en suis fier. Elle consistait à encourager, voire contraindre les partis politiques au regroupement. La FCBE, qui était au début de la réforme le parti le plus important parmi la centaine de petits partis que comptait le Bénin, avait l’opportunité d’absorber un grand nombre de ces petits partis et de devenir un parti de dimension nationale, pour peu qu’elle en ait eu la volonté. Mais comme c’était une réforme engagée par Patrice Talon, pas question que cette réforme prospère, même si la FCBE devait en profiter. De même, l’appel de Patrice Talon a ouvert un partenariat avec la FCBE et accueilli des cadres FCBE dans la gouvernance politique et technique du pays, mais cela a été refusé par tous ceux qui ont estimé le contraire et n’ont pas montré leur disponibilité à collaborer. Tous ceux-là ont été bannis. Cette volonté du régime de la rupture d’associer toutes les compétences et bonnes volontés, quels que soient leurs bords politiques, à la construction du pays s’est manifestée très tôt et ce, dès la formation du premier gouvernement. C’est dans cette perspective d’ailleurs que Jean-Claude Houssou, membre du staff de campagne de Lionel Zinsou, a été appelé au gouvernement en qualité de ministre de l’énergie dès le lendemain de l’élection présidentielle. Beaucoup d’autres, en raison de leur compétence technique ou de leur leadership politique, ont été appelés pour servir le pays aux côtés de Patrice Talon, élu comme président de tous les Béninois et non comme président d’une partie des Béninois. Certains restés fidèles à la ligne du parti et de son chef, je parle des FCBE, du président Yayi Boni, sont manifestement entrés en quasi-rébellion contre le nouveau régime et ceux qui ont choisi de servir le pays à mes côtés ont été, comme je l’ai dit, purement et simplement bannis. Ce sont ces deux phénomènes, refus d’adhérer aux réformes politiques et refus de toute collaboration avec le nouveau régime, qui ont conduit pratiquement à la scission des FCBE puis à la création du parti Les Démocrates. Je résume. Et je peux vous dire que le point d’orgue de cette opposition radicale de principe a été atteint à l’occasion des élections 2019.

Mais de quoi il s’agit concrètement, Monsieur le Président.

Mais vous n’avez pas manqué, en tant que Béninois de suivre les événements, tout ce qui s’est passé au Parlement puis à l’occasion de l’élection, avec les drames qui ont suivi. Souhaitez-vous que j’aille dans le détail ?

Allons-y, on veut bien comprendre, Monsieur le Président.

Je crois que c’était en février 2019 que j’ai reçu ici au Palais l’ensemble des partis politiques représentés au Parlement, parce que nous venons d’engager la réforme du système partisan. Les textes adoptés, qui répondaient parfaitement à l’attente de tous avant 2016, ces textes ont commencé à être boudés par une partie de la classe politique, notamment les FCBE d’alors. Et ils ont estimé que les nouveaux textes n’étaient pas convenables, trop rigides et risquaient de ne pas leur faire gagner les élections. Mais comme nous sommes au début du processus et qu’il fallait trouver un terrain d’entente, j’ai accepté que l’ensemble des acteurs politiques au Parlement se mettent ensemble pour trouver les textes qui, selon eux, permettraient à tout le monde d’aller aux élections sereinement, tout en engageant la réforme du système partisan.

Ne pas rester au statu quo de notre passé connu, excusez-moi le terme, de pagaille politique, mais d’engager une réforme qui reste à la portée des uns et des autres. C’est un contrat qui a eu lieu au Parlement sous la présidence du Président Houngbédji, président de l’Assemblée à l’époque, et un consensus a été trouvé. L’ensemble de tous les acteurs représentés au Parlement ont abouti à un consensus. Je crois que ce consensus a été consigné dans un document le 18 mars 2019. Ceux représentant l’opposition dans le comité sont allés voir le président Yayi Boni pour lui présenter le consensus. Mais tenez-vous tranquille, le président Yayi Boni a refusé que le consensus soit adopté, que les textes prévus pour être votés, afin non seulement d’engager la réforme mais de permettre à tout le monde d’y aller plutôt aisément, soit rejetés.

Ces textes ont été refusés par le président Yayi Boni. Il a dit aussi à ceux qui sont venus le rencontrer, que les choses n’ont qu’à rester en l’état, que si l’élection ne doit pas avoir lieu, elle n’aura pas lieu et que nous verrons bien. La mort dans l’âme, ses propres représentants revenus au Parlement ont indiqué que bien qu’ils aient travaillé au consensus, bien que les nouveaux textes qui devraient être pris, leur convenaient bien, que la ligne du parti ne permet pas d’avancer et de signer quoi que ce soit. Encore moins de voter de nouveaux textes, puisqu’il était prévu que les textes changent. Je dois préciser qu’à la suite des négociations au Parlement, tous les représentants de chaque camp, Mouvance, opposition et consorts, comme je disais tout à l’heure, après avoir abouti au consensus, tous les représentants désignés avaient signé l’accord de consensus. Donc avant d’aller soumettre cela au président Yayi Boni. C’est parce que celui-ci a refusé qu’il n’est pas question que le consensus soit mis en œuvre, qu’ils sont donc revenus et ont dénoncé leur propre signature.

Ils l’ont dénié finalement.

Ils l’ont dénié, après l’avoir signé. Cela, je tiens à le préciser parce que pour tout le monde, il paraissait évident que ce consensus soit mis en œuvre. C’est pour ça que je crois que les représentants de l’opposition n’ont même pas estimé nécessaire de solliciter l’approbation du document avant de le signer. C’était évident pour eux parce que tout ce qu’ils ont demandé a été pris en compte. Malheureusement, l’approbation du président Yayi Boni n’a pas été obtenue et ils sont revenus au Parlement pour dénier leur propre signature et se retirer de la salle. Et d’ailleurs, à la mise en œuvre des textes, je crois, je n’ai plus le bon souvenir des choses, toutes les investigations ont été évoquées, ils sont carrément sortis de la salle. Voter un nouveau texte, ils n’en avaient rien à faire. Continuer avec les textes existants, pareil. Est-ce qu’il fallait bloquer le pays, s’arrêter là ? On fait quoi ? Avec les textes existants ou de nouveaux textes, rien ne se fera. Le Parlement a continué avec les tests existants et nous sommes allés aux élections législatives 2019. Vous connaissez la suite.

Et c’est quelque chose que je n’ai jamais voulu évoquer dans ces détails-là parce que je pense que, comme dit le président Yayi Boni lui-même, les intrigues du genre peuvent être gérées sans que l’opinion, dans son ensemble, ne découvre ces détails qui ne nous honorent pas, et encore moins un ancien président de la République. Mais je suis tenu au fait de dire, que tout le monde m’entende, que ce qui s’est passé en 2019, c’est le président Yayi Boni qui a été le seul responsable. Il a empêché la tenue normale des élections, il a empêché les démocrates de participer aux élections, c’était les FCBE à l’époque, parce qu’il a empêché que des textes consensuels soient mis en œuvre pour permettre une élection apaisée. Il a pratiquement empêché que les élections aient lieu dès l’adoption des textes au Parlement. J’ai assumé, j’ai été vu comme celui qui est à l’origine des violences électorales que nous avons connues. C’est mon rôle, je suis dans la charge, j’ai assumé.

Mais ce qui se passe et qui continue de se passer ne peut pas me permettre de rester silencieux indéfiniment. Alors, je crois qu’à la suite de cet événement, nous avons eu droit à l’installation de ce Parlement qualifié de monocolore, qui s’est installé sans les FCBE, et qui a été qualifié de monocolore. Mais devrions-nous arrêter toutes les réformes en raison de cette situation, de l’opposition du président Boni Yayi ou bien fallait-il continuer à construire le pays en faisant les réformes, en espérant que la foi dont le président Boni Yayi se réclame finirait par l’assouplir ? Nous prions tous, et nous espérons chaque fois que le ciel nous accorde de faire de bonnes œuvres, de calmer nos pulsions, nos colères, pour qu’autour de nous la vie soit confortable pour les uns et les autres.

Moi, j’ai espéré que cette foi finirait par avoir raison de la position du président Yayi Boni, mais je crois que rien n’y fit. Nous avons donc décidé de ne pas arrêter le processus de mise en œuvre des réformes, et nous sommes allés donc le plus loin possible pour rester dans la dynamique de l’aboutissement à un pays doté de grands partis politiques susceptibles de représenter toutes les régions du Bénin à l’occasion de chaque élection, que ce soit législative, communale ou présidentielle.

Notre action a continué à tenter d’amadouer les FCBE et leur président, notamment à travers un dialogue politique convoqué en octobre 2019. L’intérêt de ce dialogue était de tourner la page de la non-participation des FCBE aux élections, et de repartir sur une base nouvelle avec des textes ajustés. Presque tous les partis politiques existants ont participé au dialogue, y compris les FCBE. Je crois qu’à l’époque, il y avait une dizaine de partis convenablement enregistrés selon la charte des partis, et FCBE a participé au dialogue. Mais le fait d’avoir participé au dialogue, le président Boni Yayi a décidé d’exclure tous les cadres FCBE, les leaders FCBE qui sont venus au dialogue. Vous connaissez, vous avez suivi un peu ce qui s’est passé dans cette période-là. Bien sûr. Un processus a été engagé pour les exclure du parti. Je crois que c’était même allé en justice. Évidemment. Je crois que le président Boni Yayi n’a pas réussi à les exclure du parti, et le parti devait rester dans son intégrité avec tout le monde. C’est ce qui a fait partir le président Yayi Boni avec certains, et qui a donné lieu à la création des démocrates. Mais le président Boni Yayi a décidé d’exclure tous les cadres et leaders FCBE ayant pris part aux échanges, ce qui a conduit à la création du parti Les Démocrates en 2020. Le pays a ensuite continué son chemin jusqu’aux élections législatives de 2023. Les Démocrates ont finalement accepté de participer aux élections avec les mêmes textes et ont obtenu 28 députés.

J’ai refusé de revenir en arrière, de baisser les seuils, car cela aurait entraîné la fragmentation des partis et ruiné les efforts de regroupement. J’ai maintenu les tests et le code électoral en l’état pour contraindre les acteurs à rester unis et poursuivre le processus de regroupement. Aujourd’hui, avec les élections présidentielle, législatives et communales de 2026 à l’horizon, le code électoral reste indispensable pour tous et encourage les partis à collaborer après les élections afin de cesser de se voir comme des ennemis. L’exemple récent du vote du budget de l’État 2025 en témoigne. Le gouvernement a intégré la quasi-totalité des observations des Démocrates dans le projet de budget, pourtant, ces derniers ont voté contre. Cela illustre bien l’esprit de compétition politique qui persiste dans l’adversité, alors même que nous avons tous intérêt à construire un pays uni.

Je suis à la fin de mon mandat et il serait regrettable de laisser perdurer ces divisions. Construire un pays implique de dépasser les rivalités et de collaborer au-delà des clivages politiques. Le vote du budget de l’État 2025. Quand le gouvernement travaillait sur le projet de budget, le ministre des Finances est allé au Parlement rencontrer les divers groupes parlementaires, les diverses commissions pour échanger sur l’articulation du budget et ses détails. Les démocrates, pour une fois, ont participé au débat et ont fait des observations pertinentes. Et ont suggéré des modifications et des amendements au projet de budget. Le ministre des Finances s’est employé à prendre en compte la quasi-totalité des observations et des recommandations des démocrates. C’était une belle occasion pour montrer que le pays est un, indivisible.

Et je profite pour l’en féliciter à nouveau. Mais toutes les gymnastiques possibles ont été faites pour que toutes les observations soient prises en compte et que toutes les recommandations des démocrates soient intégrées au projet de budget. Le ministre est revenu au gouvernement. Présenté la nouvelle mouture. Le gouvernement l’a approuvé entièrement dans son intégralité et a souhaité que le budget soit voté en l’état avec les nouvelles dispositions. Au vote, les démocrates ont fait exactement ce qu’ils ont l’habitude de faire, exactement le contraire de ce qu’ils ont souhaité. Quelques temps, quelques jours avant, ils ont voté contre le budget. Comment ça peut se comprendre ? Et nous avons appris dans la coulisse que le compte rendu qui a été fait au président Boni Yayi pour solliciter son accord avant de voter le budget, que cet accord n’a pas été obtenu et que le président leur a interdit de voter le budget, bien que celui-ci ait pris en compte la quasi-totalité de leurs observations et recommandations. Ce n’est pas acceptable.

Et vous voulez que, passant la main, je recommande que le pays continue ainsi. On a l’impression que la compétition politique réside dans une adversité éternelle. Qu’après les élections, les partis ayant été en cause sont devenus des ennemis. Mais ça ne se passe nulle part comme ça, c’est vrai. Cela arrive quelquefois dans quelques endroits du monde, mais pour un pays où tout est à construire, le consensus est indispensable pour, non seulement, faire les efforts nécessaires, engager nos populations dans les efforts, présenter aux partenaires de développement que nous voyons tous le développement du pays comme un impératif, et que nos guéguerres ne sont pas de nature à empêcher les grandes actions, et notamment un budget. Vous voyez ce qui se passe en France ? La France peut se permettre de ne pas avoir un budget. Le pays est grand, l’industrie, le commerce fonctionnent parfaitement sans l’État, et l’État n’est pas le principal acteur économique. Au Bénin, la paralysie de l’État serait une catastrophe. Donc on ne peut pas, pendant qu’ailleurs les gens s’entendent, qu’ils soient de bords différents pour travailler ensemble, pour trouver un consensus, on ne peut pas ici, même si le consensus est trouvé, dire que nous sommes des ennemis, et dire qu’il faut que le pays soit bloqué, paralysé, pour peut-être qu’il y ait des relations anticipées, ou qu’il y ait des coups d’État, ou qu’il y ait je ne sais pas quoi.

C’est malheureux, et je prie tous les dieux pour que la vie du Bénin ne se conjugue plus en de tels combats politiques et autres, en de telles dynamiques de confrontation éternelles. Et c’est bien pour ça que je suis aujourd’hui favorable à ce que nos textes, le code électoral et autres, obligent les gens, certes à aller en compétition, mais à travailler après ensemble pour l’intérêt national. Et je l’ai dit aux jeunes que j’ai rencontrés il n’y a pas longtemps ici au Palais. Je leur ai dit, mais qu’est-ce qui oppose l’UP, BR ? Qu’est-ce qui oppose l’UP, BR et les démocrates ? Qu’est-ce qui nous oppose fondamentalement ? Si ce n’est une question de feeling. Nous avons les mêmes besoins d’eau, d’électricité, de routes, d’emploi, de santé, de bonne santé, d’éducation. Et ces choses-là ne relèvent pas d’une idéologie. On peut aller à la compétition, mais on peut travailler ensemble. Et le monde va ainsi.

Regardez en Allemagne. Nous avons vu pendant longtemps que la CDU et le SPD, je crois, qui ont souvent des partis challengers, qui se challengent, qui vont aux élections ensemble, à médire les uns contre les autres, une fois les élections finies, ils se mettent ensemble pour gérer le pays. Et chacun apporte sa pierre à la réflexion, chacun apporte sa contribution à la définition de la politique nationale. Et on a pu observer qu’à la suite de ça, la même CDU avec le SPD, pareil. Partout dans le monde aujourd’hui, regardez en Europe, on observe bien que les populations ont beaucoup évolué, les peuples ont évolué, la dynamique démocratique a évolué, la liberté a évolué. Donc il n’est plus convenable qu’un seul camp dise qu’il détient la vérité et qu’il s’impose aux autres. Il faut mettre les vérités ensemble pour construire un pays. Mais mettre les vérités ensemble requiert dans un système de démocratie que d’abord les vérités se confondent dans les urnes. Une fois que l’un a gagné… Parfois on peut gagner une élection à une voix près. 49,42% peuvent perdre au profit de quelqu’un d’un groupe qui a fait 51,01%. Ça ne veut pas dire que les 49% ont tort. Non, il faut que pour construire le pays, les responsables, les divers leaders, se mettent ensemble d’une certaine façon pour définir la conduite du pays.

Chacun dans son rôle, chacun dans son convoi, chacun selon ses compétences. C’est bien de ça qu’il s’agit et c’est pour ça que j’ai dit aux jeunes qu’après les élections, si les démocrates gagnent, pourquoi ils ne travailleraient pas avec la FCBE ? Pourquoi pas aussi avec peut-être UP et BR ? Que si le BR gagne les élections ou l’UP, pourquoi ils ne travailleraient pas avec les démocrates ? Soit au Parlement, soit même dans un gouvernement. Moi j’ai fait ça. C’est sûr qu’il peut arriver pour autant que les jeunes veuillent bien le faire. Le Code actuel prescrit cela. Est-ce que c’est mauvais que notre Code électoral demande aux partis candidats de dire s’ils ont l’intention après les élections d’échanger, de collaborer pour la gouvernance du pays ? Et si vous le dites, vous avez un bonus. C’est-à-dire les partis politiques qui disent après les élections législatives, après les élections communales, nous sommes capables de travailler ensemble, ils ont un bonus. Et le bonus, c’est que pour la législative, les 20% qui sont exigés, par ces concessions électorales, on vous permet de les sommer ensemble. Même si vous n’avez que 10% dans chaque circonscription, dès lors que vous dites je suis prêt à travailler, à discuter au Parlement avec un autre groupe qui a 12%, eh bien vous bénéficiez de ces 12%. C’est une technique pour amener les gens à commencer à se parler. C’est tout. Et bien ce coup-là, on l’attaque. Tout le monde est en train de signer des accords de gouvernance parlementaire. Mais Les Démocrates ont refusé. Le président Yayi Boni a refusé que les démocrates signent un quelconque accord avec qui que ce soit, y compris la FCBE.

La FCBE est un parti d’opposition, même modérée. C’est un parti d’opposition. Si les démocrates avaient signé avec les FCBE un accord de gouvernance et un accord parlementaire, le duo-candidat à l’élection présidentielle des démocrates ne serait pas tombé. Malgré la défection d’un des leurs. Parce que les FCBE, disposent je crois de 6 ou 7 parrainages. Les parrainages des FCBE auraient permis aux démocrates d’être présents aux élections. Donc ils ont choisi de marcher sur la corde raide, sur le fil du rasoir. Ils sont si forts, c’est très bien. Mais en ce moment, quand on a choisi de marcher sur un fil et qu’on tombe, il ne faut pas chercher le bouc émissaire. Je suis malheureux de le dire, de le répéter, je suis malheureux que les démocrates n’aillent pas à l’élection présidentielle. Ils avaient la possibilité de le faire. Ils pouvaient signer un accord avec les FCBE, moi j’ai demandé même à l’UPR et au BR de rester disposés à signer avec les démocrates un partenariat ou un accord de gouvernance. Si je l’ai dit publiquement devant le peuple avec les jeunes, c’est parce que c’est ma consigne. Et je l’ai dit pour que les cadres des deux partis UPR et BR entendent publiquement que le président de la République qui est aujourd’hui le chef de la majorité souhaite que UPR et BR puissent signer avec n’importe quel autre parti, y compris Les Démocrate.

Je l’ai dit publiquement. Pourquoi Boni Yayi ne peut pas accepter de signer un accord avec ceux-ci et dire que si vous gagnez ou si je gagne, nous pouvons travailler ensemble. Mais cette déclaration ne veut pas dire qu’ils auront l’obligation demain de nommer des ministres des deux partis. Non. C’est juste l’intention. À la limite, même les peuples ne vont pas le respecter plus tard. Mais ce serait bien que le peuple entende. C’est tout ce que voulait le Code. Et cette déclaration d’intention leur aurait permis aujourd’hui d’être candidat à la présidentielle. Le Code dit qu’à défaut d’accords de gouvernance, à défaut d’accords parlementaires, chaque liste, chaque parti devra réaliser 20% de suffrage, obtenir 20% de suffrage dans chacune des 24 circonscriptions électorales. Aujourd’hui, aucun parti n’est en mesure de le faire. Peut-être que demain ils le feront. Ni UPR, ni BR, ni FCBE, ni MOELE, ni RN. Même les Démocrates, je ne sais pas s’ils y parviendront. Nous voulons y arriver. Que demain, nos partis soient d’envergure. Pour pouvoir être représentatifs partout. Et que partout dans le Bénin, les gens se sentent concernés par l’action d’un parti, le pouvoir d’un parti. Même si le parti n’est pas majoritaire partout, que le parti soit présent, suffisamment présent partout. Comme on n’y est pas encore, et que nous demandons aux gens de se regrouper pour y arriver, en attendant d’y être, on demande aux gens de faire des déclarations d’intention. Rien que ça. Que les démocrates disent, je pourrai travailler avec le BR après les élections. C’est noble comme intention.

Ça peut les influencer demain à être un peu disponibles. Mais en quoi c’est une contrainte ? Cela leur aurait permis, bientôt d’aller aux élections législatives, sans être soumis à la satisfaction de ces 20%, ils pourront avoir peut-être 50%, 60% du Parlement. Peut-être qu’ils auront 80 députés à l’œuvre, rien qu’avec cette déclaration d’intention. Moi, je fais tout pour amener les uns et les autres à travailler ensemble, à ne plus avoir d’ennemis, au moins à déclarer leur intention de non-agression.

Oui, vous parlez si bien d’intention de non-agression. Mais croyez-vous vraiment à la viabilité de ces alliances entre les partis qui, aujourd’hui, sont d’obédience différente ?

Mais vous voyez bien que les obédiences ne sont pas forcément liées à des idéologies de gouvernance politique. Quand on a tout, on a déjà les fondamentaux, on a l’école, la santé, les routes, l’eau, l’électricité, assez d’emplois, on peut parler d’obédiences politiques. En réalité, liées à la vision. Mais aujourd’hui, nos populations demandent aux uns et aux autres le minimum, comment je viens de dire ça, le minimum de survie. Non, les gens sont dans des divers camps par affinité. C’est tout. Mais je vous ai dit, qu’est-ce qui différencie l’UPR du Bloc Républicain ? C’est un camp d’affinité. Qu’est-ce qui fait que les démocrates ne sont pas différents des FCBE ? Pourquoi à l’époque, les FCBE et Yayi Boni ne sont pas venus avec moi ? Parce qu’il y a un problème entre Yayi Boni et Patrice TALON. Le seul problème que les FCBE a eu dans le passé quand il était dirigé par Yayi Boni, le seul problème que les démocrates ont aujourd’hui dirigé par Yayi Boni, c’est parce qu’il y a un problème entre le Patrice Talon et Yayi Boni. La guéguerre entre mon ami, mon grand frère, l’ancien président et moi, est en train de pourrir l’environnement politique au Bénin. Même l’environnement social. En train de pourrir même la paix et la quiétude de la concorde. C’est dommage.

Vivement les élections de 2026 pour que nous quittions la scène politique. Je voudrais, tant que lui et moi, on quitte la scène politique.

Ça c’est peut-être vous, mais peut-être pas lui.

Je voudrais qu’il quitte aussi la scène politique. Qu’on le mette surtout dans un conseil de sage pour donner des conseils aux gens, pour faire des arbitrages.

Le Sénat voulez-vous dire…

Pourquoi pas, je ne sais pas quel nom ça va s’appeler, mais il serait bien que nous quittions la scène politique. Notre relation nuit au Bénin. Moi j’ai fait tout pour qu’il en soit différent, qu’il n’en soit plus ainsi, mais je n’y arrive pas. Je suis pressé que la fin de mandat arrive pour que les Béninois vivent autre chose en dehors de Talon et Yayi Boni.

Vous savez, en 1990, à la conférence nationale, pourquoi les conférenciers ont mis la limite d’âge aux élections présidentielles, 70 ans ? Pourquoi ? Ça a été affirmé. Les anciens présidents que le Bénin a connus jadis, Maga, Ahomadegbe, Apithy, Zinsou, ont pourri la vie aux Béninois par la compétition politique. Par la guéguerre de leadership. A la conférence, Paix à l’âme dApithy, Apithy n’y était plus, mais restaient encore trois. Maga, Ahomadegbe, Zinsou. Presqu’à l’unanimité, sauf les trois, les conférenciers ont décidé de les mettre à l’écart, de les mettre au repos, de leur interdire d’être candidats. C’est ça aussi, les lois des pays sont faites pour régler tous les problèmes qui se posent au pays. Moi, je demanderais bien aux Béninois au Parlement de voter une loi constitutionnelle pour interdire à Talon, à Yayi et à Soglo de faire de la politique. Qu’on aille passer nos vacances au village. Votre retraite plutôt. Mais ça devient impératif pour le Bénin. Et je vous le promets. Si les Béninois apprennent à nous oublier demain, ils changeront très vite dans le pays. Plus vite qu’on ne le pense.

Une dernière question, M. le Président. Est-ce que vous pensez que les frondeurs LD aujourd’hui pourraient atterrir aux côtés des partis de la mouvance ?

Beaucoup d’entre eux sont demandeurs. Beaucoup de démocrates sont demandeurs. Quand le président Boni Yayi est venu me voir ici au Palais il y a quelques jours, il m’a demandé qu’il fallait faire quelque chose pour que le duo soit réhabilité. Je lui ai dit que je n’allais pas faire de miracle. C’est trop tard. Vous le saviez ça. Pourquoi vous n’avez pas voulu le faire plus tôt ? Pourquoi vous n’avez pas voulu faire un accord avec les FCBE, ni avec les BR, ni avec les UP ? Il m’a dit que c’était trop tard, mais qu’est-ce qu’on peut faire maintenant ? Je lui ai dit, M. le Président, dites-moi, s’il y a un moyen de le faire, je le ferai. Mais je ne trouve pas comment. Revenir en arrière. Ils souhaitaient quoi ? Annuler le processus ? Faut repartir ? Mais ce n’est pas bien. Il ne faut pas que leur intransigeance, leurs erreurs, amènent le pays à faire du n’importe quoi. J’ai dit, M. le Président, ce n’est pas possible. Je ne peux rien faire. Je ne vois pas ce que je peux faire pour ramener le processus en arrière afin que Me Agbodjo et Lodjou soient à nouveau éligibles. Je ne sais pas ce que je peux faire. Si vous trouvez quelque chose à me conseiller, qui est dans mes cordes, je le ferai. Mais que ce soit réaliste. Et puis nous allons parler de législatives. Et je lui ai dit, M. le Président, attention. Ce que vous faites, ne continuez pas parce que si jamais il y a un malheur aux législatives, vous serez le seul responsable.

Vous n’allez pas chercher un bouc émissaire si jamais les législatives se passent mal et que les démocrates ne sont pas au Parlement. Parce que le risque de ne pas être au Parlement inquiète tout le monde. Tous ceux qui veulent aller aux législatives tout seuls sont guettés. Ils sont inquiétés par ce risque-là. J’ai entendu dire que je veux que tout le monde aille au BR ou à l’UPR. Mais ce que je lui ai dit, c’est simplement que les autres discutent, que les démocrates peuvent discuter avec le BR, discuter avec les FCBE pour faire une déclaration d’intention, d’amour. Même si l’amour ne se consomme pas après, parfois la déclaration peut suffire. Pour qu’il n’y ait pas ce risque-là. Il est parti d’ici en me disant qu’il me reviendrait là-dessus et qu’au besoin, je pourrais aider à ce que les UPR et BR acceptent de le faire.

Le débat a eu lieu chez les démocrates au lendemain de son arrivée ici. Le débat a eu lieu. Certains ont dit, alléluia, il faut le faire. D’autres ont dit non. Et in fine, le Président Boni Yayi lui-même a dit non. Nous irons aux élections dans ces conditions, quelles que soient les conséquences que ça va générer. Et nous verrons bien après ce qu’il va se passer. Mais à l’heure, il ne se passera rien du tout. Si les démocrates décident d’aller aux élections dans ces conditions, il ne se passera rien du tout. Je vais prier simplement pour qu’ils gagnent. Qu’ils enlèvent des sièges pour que le pays retrouve son calme comme d’habitude.

Un mot, M. le Président, pour conclure cet entretien.

Je voudrais conclure cet entretien avec vous, juste pour dire qu’il faut préserver la concorde, l’unité. Et il faut que chaque personne, chaque leader, chaque Béninois, qui dans sa vie sur cette terre finit d’accomplir sa mission, un rôle donné pendant un temps, qu’il veuille que ceux qui vont lui succéder, quelles que soient les conditions, puissent réussir pour l’intérêt général. Que celui qui part ne souhaite pas le chaos après lui. Je veux dire que la compétition politique ne doit pas se faire au détriment du pays. Malgré nos déceptions, malgré nos divergences, il ne faut pas que nous soyons ennemis au point de compromettre l’intérêt général. Moi, j’en ai donné le signal.

J’ai travaillé avec les FCBE au lendemain de mon arrivée à la fonction. Jusqu’aujourd’hui, je continue de le faire. L’ancien Premier ministre Zinsou, qui a été mon challenger aux élections de 2016. Aujourd’hui, il travaille avec le Benin, il travaille pour le Benin. Il fait des choses extraordinaires. Moi, je suis admiratif de ce qu’il fait. Il nous accompagne beaucoup, il nous aide beaucoup, il aime son pays. Moi, j’ai pu, en 2016, même mal juger sa capacité à se donner pour le Benin. Et j’observe, il n’est pas président, mais il fait des choses extraordinaires pour le Benin. Et ça, vous voyez, s’il avait suivi Boni Yayi , il nous aurait privés de ses compétences. Il nous aurait privés de tout ce qu’il nous apporte dans le système de notre action. C’est ce que je voudrais que chacun fasse. Qu’on soit d’un bord ou de l’autre. Quand c’est le pays, on peut servir le Benin. On peut ne pas être d’accord avec Talon Patrice. On peut ne pas être d’accord avec la rupture. Mais il ne faut pas saboter le Benin. Il y a un monsieur qui fait des posts sur les réseaux sociaux qui est un poulain du président Boni Yayi, un proche démocrate. Un protégé, un poulain, je sais de quoi je parle, qui raconte sur les réseaux sociaux que nul ne doit aller investir au Benin. N’allez pas au Benin, vous serez escroqué. Vous serez broyé. Vous serez mis en prison. Les Béninois sont des voleurs. Ils vont vous voler. Ils vont vous escroquer. L’Etat même du Benin va vous escroquer aussi, vous serez broyé. C’est un Béninois qui est un des sympathisants démocrates et proche du président Boni Yayi qui dit de pareilles choses sur les réseaux sociaux. Mais j’aurais voulu dire au président, mais dites-lui d’arrêter, ce n’est pas bien parce qu’il ne porte pas juste préjudice à Talon. C’est le Benin. Il dit aux gens de ne pas venir au Benin. N’allez jamais au Benin. Alors quand je serai parti, il dira quoi ? Ah bon, le diable est parti, maintenant vous pouvez aller au Benin. Mais il aura impacté négativement le Benin. Il impacte le Benin négativement. Quand le président est venu me voir il y a quelques jours, permettez que je laisse les détails pour conclure. Il y a des webactivistes qui sont dans la même dynamique qui seraient en détention aujourd’hui.

Le président Boni Yayi m’a prié de faire quelque chose pour les libérer. J’ai dit mais je fais quoi, monsieur le président ? C’est la justice, je ne commande pas la justice en cette matière. Il m’a dit non, faites quelque chose parce que quand ils vont sortir, ils ne recommenceront plus. J’ai dit ah bon, président, vous pouvez en jurer ? Il m’a dit oui. C’est alors que je lui ai dit ah bon, vous êtes commanditaire. Ce n’est pas bien. Ce n’est pas bien. Je veux donner un mot de fait pour exhorter les uns les autres, exhorter les Démocrates à être disposés à tout, disposés à ouvrir. Je veux interpeller surtout ceux que j’ai vus démissionner des Démocrates. C’est malheureux qu’ils aient démissionné. C’est dommage. Mais j’ai entendu qu’ils ont un idéal et qu’ils ne veulent plus continuer à prêcher dans le désert. Moi, ça m’a touché. Si j’ai un message pour eux, c’est que si leur idéal ne veut pas prospérer dans le groupe politique actuel et qu’ils sortent de ce groupe-là, il ne faut pas que leur idéal meure.

Il faut qu’ils continuent de le promouvoir. Mais le meilleur moyen de promouvoir un idéal politique c’est d’être un acteur politique. Et c’est pour ça que, sans état d’âme, je vais inviter le ministre d’État, Wadagni, candidat à l’élection présidentielle, je vais inviter l’Union Progressiste Le Renouveau, je vais inviter le Bloc républicain, Moele Bénin, RN pour les rencontrer. Discuter avec eux. Et leur permettre même de d’exprimer leur idéal dans un cercle plus large parce que ce que je prône depuis, c’est d’ouvrir les champs de discussion politique. D’ouvrir les cercles de rassemblement politique. Et il ne faut pas les laisser en rade parce qu’ils n’ont pas trouvé bonheur là où ils sont.

Mais ils sont des acteurs politiques. Ils continuent de vouloir défendre un idéal. Il ne faut pas les laisser en rade. Je serais heureux de les voir discuter ensemble. Et je voudrais également que d’autres démocrates qui sont encore dans le parti influencent les faucons du parti pour qu’ils ouvrent des discussions avec la FCBE, avec le BR, avec l’UPR pour que les compétitions électorales ne fassent pas des ennemis. Et ça, c’est ma prière. Et je vais agir pour ça. Je verrai le ministre Wadagni, je lui dirai, qu’il doit le faire. Je verrai le Président Abdoulaye Bio Tchané, Ayadji et Mme Prudencio, je vais leur dire qu’il faut aller parler avec ceux qui n’ont pas trouvé leur bonheur et qui sont sortis pour que le Bénin continue de rassembler ses fils qui ont de la vocation politique pour travailler ensemble pour le Bénin. C’est ma volonté, c’est ma prière

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