Le président ivoirien Alassane Ouattara entretient le suspense. Au lendemain de sa désignation comme candidat à la présidentielle d’octobre par le RHDP, son parti, il a déclaré dimanche 22 juin qu’il rendrait sa décision « dans les jours qui viennent ». Une réponse attendue par des dizaines de milliers de partisans rassemblés au stade d’Ebimpé à Abidjan, mais qui ne fait qu’accentuer les tensions autour d’une éventuelle candidature pour un quatrième mandat, jugée inacceptable par l’opposition. »Je prendrai, après mûre réflexion en mon âme et conscience, une décision », a lancé le chef de l’État ivoirien, 83 ans, sous les ovations d’un public conquis.
« Je ressens la force et la sincérité de votre appel… oui, je vous ai entendus », a-t-il ajouté, visiblement ému, devant une foule habillée aux couleurs du RHDP.Officiellement désigné la veille comme candidat du Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix, Ouattara ne s’est pourtant pas engagé formellement. Une stratégie qui lui permet de mesurer l’ampleur du soutien populaire tout en jaugeant la pression politique et institutionnelle. « Nous avons transformé la Côte d’Ivoire, mais nous devons aller encore plus loin », a-t-il déclaré dans un discours marqué par les bilans économiques et les promesses de continuité.
Mais cette perspective d’un quatrième mandat suscite une vive controverse. L’opposition crie à la dérive autoritaire, dénonçant une candidature anticonstitutionnelle. En 2020 déjà, le troisième mandat de M. Ouattara avait été très contesté. Aujourd’hui, le débat reste brûlant.Le climat politique s’est encore tendu depuis la publication de la liste électorale début juin, qui exclut plusieurs figures majeures de l’opposition. L’ex-président Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé, Guillaume Soro ou encore Tidjane Thiam en sont absents, écartés. « Je n’abandonnerai pas le combat contre le quatrième mandat », a martelé Laurent Gbagbo jeudi dernier, dénonçant un retour au parti unique.Même son de cloche chez Tidjane Thiam, leader du PDCI : « La continuité conduira à l’instabilité, le changement à la stabilité ».
Le spectre d’une crise et ses nombreuses morts
Face à la polémique, Alassane Ouattara a tenté de rassurer. « Ces élections seront apaisées, démocratiques et transparentes, tout se passera dans la paix et le calme », a-t-il affirmé.Mais la mémoire des violences électorales reste vive. En 2010-2011, la crise post-électorale avait causé la mort de quelque 3.000 personnes. En 2020, au moins 85 personnes avaient perdu la vie dans les troubles liés à la présidentielle.Aujourd’hui encore, les tensions sont palpables. Le président exécutif du PPA-CI, Sébastien Dano Djédjé, prévient : « La Constitution lui interdit d’être éligible.
S’il choisit d’être candidat, nous contesterons par des moyens légaux. Cette possibilité d’un quatrième mandat pour Ouattara cristallise les inquiétudes. Les observateurs redoutent que cette campagne, dans un contexte de fractures politiques profondes, ne ravive les tensions et les violences qui ont déjà endeuillé le pays.
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